BLACKOOT
discographie
par Denis PROTAT
Blackfoot est une
légende du southern rock. Formé à Jacksonville en Floride,
le groupe s'appelait au départ en 1968 Fresh Garbage (du nom d'un titre
de Spirit, la célèbre formation psychédélique
emmenée par le guitariste virtuose Randy California) puis Hammer et
enfin Blackfoot du nom d'une tribu indienne Blackfeet qui combattit aux côtés
des sioux. Rick Medlocke fit partie de formations obscures (The Hot Water
Blues Band, The Rocking Aces, Candied Apple), apprit le banjo à 5 ans,
la batterie (il en joue sur le premier album de Lynyrd Skynyrd). Jackson Spires,
lui, jouait dans Tangerine. Il fallut attendre 1975 pour que le premier brûlot
"No Reservation " ne voit le jour. S'ensuivent 5 albums dantesques
: " Flyin' High ", " Strikes ", "Tomcattin",
"Marauder" et le "Highway Song Live".
Le groupe se sépare en 1986 après le piètre " Vertical
Smile " pour se reformer 3 ans plus tard et enfanter d'un bon "
Medecine Man " suivi de l'excellent " After The Reign ". Une
reformation est d'ailleurs en cours
.
mais examinons cette longue aventure sudiste de plus près
.
No
reservation (Island 1975)
Rick
Medlocke, Charlie Hargrett, Greg T. Walker, Jackson Spires : premier album
(produit par Jimmy Johnson et David Hood) et première bombe sudiste.
Tout est déjà là : le groupe joue depuis 8 ans ensemble.
Premiers frissons, premières ballades sudistes de rêve avec "
Stars ", " Not Another Maker ", " I Stand Alone "
(la voix de Rick atteint sur ce titre des sommets d'intensité accompagnée
de churs, renforçant encore cette déchirante solitude
de
presque 8 minutes
et à la cinquième
.vlan !
vous
l'aurez compris
gratte à fond digne d'un final de " Free
Bird "). Mais ce qui frappe le plus à l'écoute de No Reservation
c'est la richesse des ruptures au sein des morceaux avec de multiples relances
rythmiques entrecoupées de solos de guitare riches et variés.
Sans doute l'album le plus " complexe " musicalement parlant de
toute la discographie du groupe. Ecoutez " Take a train " ou "
Big Wheels " et vous en aurez une parfaite illustration. Un très
grand disque sur lequel les musiciens affichent une étonnante maturité
musicale. Pour les mordus du vinyl, le LP original commence à être
assez rare.
A noter enfin un dernier titre " Railroad man " (c'est également
le titre du premier morceau de l'album),
petite pièce de bluegrass au banjo de 1'10, sorte de clin d'il
aux origines.
Flyin'
High (Epic 1976)
Le groupe
signe sur Epic et tourne avec Ted Nugent et Aerosmith.
L'album est, une nouvelle fois, produit par Jimmy Johnson et David Hood. Nous
sommes dans la continuité de No Reservation : même intensité
musicale, même énergie. Une deuxième salve monumentale
: alternance de hargne rock'n'roll (" Strange On The Road ", "
Feelin' Good ", " Dancin' Man "). - les riffs rebondissent,
s'enchaînent avec une puissance terrifiante - et de douceur sudiste
(" Try A Little Harder ", " Island Of Life ", " Junkie's
Dream "). Les solos de guitare sont fabuleux comme sur le deuxième
titre " Flyin' High ". Le groupe compose ses premiers titres super
heavy : " Stranger on the road ", " Dancin Man " et son
riff gras et puissant. On sent également l'influence diffuse du père
adoptif - son grand-père en fait - (Shorty Medlocke, musicien de bluegrass)
sur Rick. Le titre " Mother " en est une belle preuve avec ses sonorités
laid-back. Une uvre flamboyante.
Strikes (Atco 1979)
Blackfoot
a un nouveau manager : Al Nalli et signe sur Atco. Strikes sera certifié
disque d'or au bout d'un an. La thématique animale au niveau des pochettes
est lancée. Le cobra bondissant sera choisi et illustre à merveille
le contenu explosif de l'album. L'album s'ouvre sur un " Road Fever "
endiablé, apogée de ballades sudistes avec un " Highway
Song " majestueux, sommet du genre. 4'11 de bonheur prolongé par
une chevauchée épique comme seuls les grands du rock sudiste
savent le faire ! 6'59 d'émotion. Rick rend une fois encore hommage
à son ancêtre avec " Train, train, train " (titre composé
par ce dernier en 1926). C'est le vieil homme qui joue l'intro à l'harmonica.
A noter aussi, fait rare chez Blackfoot 3 reprises sur le disques : "
Pay My Dues " de Blues Image (sans doute le groupe de Mike Pinera), "
I Got A Line On You " de Randy California (au sein de Spirit) et le "
Wishing Well " du grandissime Free de Paul Kossof et Paul Rodgers (pré
- Bad Company).
Tomcattin'
(Atco 1980)
Déjà
4 albums à leur actif. Une panthère noire orne cette fois-ci
la pochette. Le disque sera produit par Henry Weck. L'uvre se veut plus
ambitieuse après le succès de Strikes. Le groupe recrute des
extras : Pat Mc Caffrey (claviers, saxophone) ; Henry H-Bomb Weck (percussion
et anciennement dans Brownsville Station de Kub Coda) ; Peter " Madcat
" Ruth (harmonica électrique). Dans l'encyclopédie du hard-rock
des seventies j'écris que Tomcattin' est très légèrement
en deçà et nous propose pas le " morceau qui tue "
à la " Highway Song ", " Diary Of A Working Man ".
Je confirme, même si les dix titres de l'album sont exceptionnels (un
soupçon moins bruts - " Dream On " - avec des claques sudistes
labelisées heavy comme " Street Fighter " ; " Gimme,
Gimme, Gimme ", " Warped ").
Le groupe tourne avec Scorpions en Europe. Shorty Medlocke intervient, une
fois encore, à l'harmonica sur
" Fox Chase ".
Marauder
(Atco 1981)
Sans
doute le chef d'uvre absolu de Blackfoot (seul groupe de metal-sudiste
?), encore un ton au-dessus des deux premiers opus et de Strikes (est-ce possible
?). Un aigle à l'il perçant nous prévient que la
démonstration n'est pas terminée. Marauder cultive à
merveille les facettes opposées et merveilleusement complémentaires
du rock sudiste : entre ballades bouleversantes et titres en béton
armé. L'album comprend les titres les plus heavy que le groupe n'ait
jamais composés : " Good Morning " (numéro 1 en Angleterre),
" Too Hard To Handle " mais aussi deux des plus belles ballades
jamais enregistrées : " Diary of A Workingman " et "
Searchin' ". Cela ne vous rappelle t-il pas un certain " Simple
Man " et " Free Bird ", eux aussi sur le même album d'un
groupe frère ?
Nous aurons encore une fois droit à notre minute Shorty sur "
Rock'n'roller ", titre très rock'n'roll dans l'esprit.
Difficile de faire mieux dans le style. Trop forts ces mecs
Highway
Song (Atco 1982)
Ce live
d'anthologie est un formidable témoignage de l'énergie folle
du groupe sur scène.C'est l'album préféré avec
No Reservation de Jackson Spires. Blackfoot tourne 5 mois en Europe après
la parution de Marauder. Ce live est donc entièrement enregistré
sur le vieux continent et principalement à l'Hammersmith Odeon et à
Glasgow
(le groupe tenait en fait à rendre un hommage tout particulier à
leur fans britanniques). Les musiciens nous assènent leurs plus grandes
compositions : " Gimme, Gimme ", " Good Morning ", "
Road Fever ", " Train, Train ", " Highway Song "
pour un festival électrique de haute volée. Blackfoot atteint
à cette occasion des sommets et une perfection troublante. Comment
rééditer un tel exploit ?
Siogo
(Atco 1983)
Cet album
coïncide avec l'arrivée de Ken Hensley d'Uriah Heep aux claviers.
Jon Lord avait décliné au dernier moment l'offre de groupe préférant
reformer Deep Purple et enregistrer l'album Perfect Strangers.
L'intro au synthé sur le premier titre " Send Me An Angel "
inquiète fortement. Y-aurait-il erreur quant à la galette posée
sur la platine ? Soyons clairs : cet album est moins réussi que tous
ses prédécesseurs, moins " roots " avec un son plus
policé. Mais soyons également juste : Siogo est un très
bon album de hard-rock avec des titres musclés comme " Crossfire
", " We're going down ", " White man's land ", "
Sail Away ". Un " Drivin' Fool " dans l'esprit du " Good
Morning " (sur l'album " Marauder "), quasi heavy-metal. Alors,
passons outre les passages synthétiques et prenons le plaisir indiscutable
que procure l'écoute de ce disque, parfois injustement décrié.
King
Biscuit Flower Hour Live
L'enregistrement
a lieu le 10 Août 1983 au Palladium à Hollywood, Californie.
Voici un live intéressant à défaut d'être exceptionnel.
Ce pour plusieurs raisons :
1) Certains titres sont beaucoup plus longs que les versions studio
(" Train, Train, Train " dure 8'22 et " Highway Song "
10'21) donc, riches en différences.
2) Un interview
avec Rickey Medlocke de 17'08 clôt le CD.
C'est toujours attirant même si l'on apprend pas grand chose.
En revanche
musicalement parlant nous sommes très loin du Highway Song Live.
Le son est moyen, des effets synthétiques font leur apparition. Donc
un
disque réservé aux fans uniquement !
Vertical
Smiles (Atco 1984)
Charlie
Hargrett a quitté le groupe. A
mon sens, il y a deux approches possibles de cet album.
Soit l'on
reste dans l'optique " southern rock " en gardant bien en tête
la musique de Blackfoot et il s'agit alors d'une piètre soupe indigeste
(nombreux furent les fans terriblement déçus par la musique
proposée). Soit,
l'on écoute le disque en faisant " table rase " et cet opus
devient un assez bon album de hard-FM à tendance boogie-rock
comme sur les titres " Ride with you ", " Get in on ",
" Heartbeat and Heels " à la Afterburner de ZZ Top.
A vous donc d'adopter l'une ou l'autre position.
Rickey
Medlocke & Blacfoot (Atco 1987)
Rick s'émancipe, oublie les bases du bon rock qui tâche, s'accoutre
dangereusement de cuir rutilant. Ce n'est décidément pas un
album digne de notre légende. La présence de Wizzard, le bassiste
de Mother's Finest n'y changera rien. Pour complétistes only.
Medecine
Man (Atco 1993)
Ne nous y trompons pas : Medecine Man est un très bon disque, certes
très court, mais de qualité. Produit à nouveau par Al
Nalli. Seul Rick est resté fidèle au poste. Gunner Ross (batterie),
Neal Casal (guitares), Rikki Mayr (basse) et Doug Bare (claviers) complètent
le line-up. Nous sommes, il est vrai, dans une catégorie inférieure
aux perles du groupe, mais ne boudons pas notre plaisir à l'écoute
des très enlevés " Sleazy World ", " Runnin',
Runnin'.
L'approche musicale des musiciens est dans un esprit plus " heavy-rock
", plus blues avec des ballades moins inspirées telles que "
Guitar Slinger Song & Dance ".
Un disque à acquérir néanmoins.
Rattlesnake
Rock'N'Roller - The Best Of Blackfoot- (Rhino 1994)
Bonne
rétrospective du groupe mais comment ne pas, au moins
.acheter
les six premiers albums ?
Comment compiler l'oeuvre d'un groupe dont chaque titre frôle l'excellence
?
Coffret
bootleg Gimme, Gimme, Gimme
Je
n'avais encore jamais eu l'opportunité d'écouter ces enregistrements
publics de 1981, 1983, 1985
au Kneeworth Festival (principalement). 4 disques extraordinaires parsemés
d'imprévu.
S'agissant de pirates je n'en rajouterais pas davantage par honnêteté
vis à vis de nos idoles.