JEFF JENSEN: Road Worn And Ragged (2013)
Jeff Jensen nous vient de Portland, Oregon, et a déménagé à Memphis. Il s’agit là de son troisième album. Outre son « backing group », il a invité sur son disque Brandon Santini, la star montante de l’harmonica blues de Memphis (comme il le prouve à chacune de ses interventions qui font relativement mal), et Victor Wainwright au piano, que nous connaissons bien (via le Southern Hospitality Band, par exemple).
Jeff Jensen nous propose des compositions originales ainsi que des reprises judicieusement choisies. Le style de guitare de Jensen est emprunt d’authenticité ; il n’a rien inventé mais il restitue le blues de la plus belle façon qui soit. Pas mal de morceaux remarquables sonnent clair à nos oreilles.
« Brunette Woman » un blues en mode mineur, nous replonge dans l’esprit du Chicago Blues. « Goodbye Portland » flirte avec le jazz , avec sa guitare acoustique. Ce titre est apparemment autobiographique (« je vais dans la ville de Memphis, la ville d’Elvis ») et Victor Wainwright expose tout son art. Avec « Pepper », un rock'n roll/jump instrumental, Jeff Jensen s’amuse à imiter Charlie Christian qui serrerait la pogne à Brian Setzer. Tous les plans sont là, de la descente de notes jazzy aux accords en triade rockabilly.
Nous avons droit à deux reprises de choix : « Little Red Rooster » de Willie Dixon (avec un bon solo d’harmonica et une guitare très « hot'n blue ») et « Crosseyed Cat » du grand Muddy Waters, repris avec sincérité et fidèle à l’esprit original.
« Raggedy Ann », un blues boogie où la gratte et le piano se répondent et s’en donnent à cœur joie, nous replonge dans l’ambiance des années cinquante… On croirait écouter Roy Hall, pionnier du piano rock n’ roll fifties.
Et puis « River Runs Dry », une superbe balle laid back, nous évoque le regretté JJ Cale. On a l’impression de flotter paresseusement le long du Mississippi dans un radeau « river rat ». C’est sans doute la plus belle composition de l’album.
Voilà donc un disque pour les amoureux du blues, bourré de feeling, contenant toutes les influences de la « musique du diable » saupoudrées de respect, d’honnêteté et de talent. Que dire de plus ?
Olivier Aubry