BLUESMILES:  Mojocaïne (2016)
    
    
    
    
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
Personel :
  Fabrice  « Fab » Galodé : Chant – Guitare
  Jérôme  « Jay » Gautier : Guitare
  Sébastien « Seb »  Kagan : Harmonica – Chœurs
  Nicolas « Nico »  Bourseau : Basse
  Mathieu « Mat » Ros :  Batterie
    
    Invités :
    Jessica Roussel : Chœurs
  Ted  Beauvarlet : Chœurs 
Titres :
 01 – Bluesmiles boogie
    02  – Big boss
    03 – Peace’n blues
    04 – Mr Whisky
    05 –  Love with no filter
    06 – One more blues
    07 –  Still on the road
    08 – Another crime in town
    09 –  Mojocaïne
    10 – Hey Mississippi
 Bizarre de se retrouver à  écrire la chronique du CD d’un groupe qui n’existe déjà  quasiment plus à part pour de fugaces retrouvailles le temps d’un  concert improvisé. Réunis depuis 2010 sous la houlette de Fabrice  Galodé, les cinq musiciens ont progressé à pas de géant, ont  incendié les scènes bretonnes, en particulier en région rennaise,  et ont enregistré et sorti en 2016 ce CD aux frontières du blues,  du boogie et du rock, styles dont nous sommes très proches à RTJ.  Malheureusement, nous n’avons pu hélas disposer de la galette  qu’une fois la fin du groupe annoncée! C’est que ce n’est pas  facile de faire coïncider les agendas, et avec un peu de chance vous  auriez pu lire cette chronique beaucoup plus tôt. 
    Quoi qu’il  en soit, le produit existe et ma foi, pour ceux qui voudraient passer  un très bon moment musical, il est toujours possible de se le  procurer, les contacts pouvant s’effectuer soit via le site du  groupe (http://www.bluesmiles.fr/),  soit via la page Facebook qui lui est dédiée, et d’emblée je  vous le recommande fortement.	Alors, ce CD, que contient-il de si  beau pour que je prenne ainsi position de manière si nette ?  Rien de franchement révolutionnaire, c’est sûr, mais dix titres  originaux (quand même!) et plutôt bien ficelés dévoilant des  atmosphères variées. Tout commence par un des emblèmes du groupe,  « Bluesmiles boogie », entêtant à souhait, sur lequel  vient hululer un harmonica bien mené, un morceau donnant toute sa  saveur sur scène, mais qui vaut ici aussi son pesant de cacahuètes.  Changement de style avec « Big Boss », plus syncopé, qui  alterne passages en retenue et accélérations grisantes pendant que  gronde la basse de Nico, pour finir par prendre son envol final sur  le solo d’harmonica. « Peace’blues » nous refait le  coup musical de « Dust my broom » sans la slide et en  bien enlevé, avec l’harmo aux « fills » (faudra un  jour trouver l’équivalent français pour ce terme, si vous avez  une suggestion autre que « remplissage »…) qui nous  gratifie aussi d’un bon solo relayé par un autre bon solo, de  guitare cette fois. Merci Fab ! « Mr Whisky » se la  jouerait presque crooner, en nous refaisant le coup du « Devil  in the bottle » de Lynyrd. À nouveau les solistes brillent,  comme ils le feront tout au long de l’album. À déguster. À  propos de diable, il semble bien habiter le tempo du boogie « Love  with no filter » où la batterie de Mat, remarquable tout au  long de l’album, a droit à sa mise en évidence. J’aime beaucoup  « One more blues », long blues à l’ambiance  crépusculaire et tendue de jeteur de sorts qui rappellera aux  oreilles averties le fantastique « Jet black crow » des  Inmates. Le morceau nous offre aussi l’occasion de comparer  l’opposition de style entre Jay et Fab, qui ont une approche très  différente mais très complémentaire du solo. Radical changement  d’atmosphère, avec « Still on the road », morceau  virevoltant, entraînant, que la rythmique de Jay rend légèrement  funky. Le break d’harmonica permet d’emmener la fin du morceau  dans une autre dimension où apparaissent des chœurs insistants. Bel  exercice ! « Another crime in town » prend des  allures de ballade morbide où l’harmonica de Seb, inspiré par les  grands espaces, semble habité de l’esprit des « middle  towns » au milieu de nulle part. « Mojocaïne »,  autre morceau de scène emblématique du groupe, semble boucler la  boucle avec son blues fiévreux aux relents texans qui pulse et  propulse le dialogue entre l’harmo de Seb et la guitare de Fab,  dialogue fructueux débouchant sur une envolée de Fab à la wah-wah.  Puis, un peu dans la tradition de beaucoup d’albums américains,  « Hey Mississippi » vient conclure l’album de son blues  acoustique nerveux à la « hobo » où glisse (enfin?) un  « bottleneck » bienvenu.	Quand la musique s’arrête, un  questionnement vient à l’esprit : mais pourquoi cet album  est-il passé si inaperçu ? Nous sommes quelquefois inondés de  production américaines, australiennes ou britanniques de bien moins  bonne qualité, tant sur l’inspiration et les compositions que sur  la qualité musicale de l’interprétation proprement dite ou sur la  qualité de la prise de son ou de l’équilibre du mixage,  absolument remarquable. Certes, on sent que les Bluesmiles n’ont  pas bénéficié de moyens gigantesques pour enregistrer leur album,  mais ils en ont tiré le maximum grâce à un travail intelligent et  de qualité. Ils l’ont fait avec passion, avec plaisir, et ce  plaisir est parfaitement restitué à l’auditeur. Même avec  retard, on est heureux de découvrir cet ouvrage qui témoigne de la  qualité des groupes français, y compris en studio, et nous touchons  peut-être là à une évolution qu’il faudra prendre en compte.  Voilà un album en tous points réconfortant dont on pourrait  déplorer qu’il fût aussi le dernier de cette formation si Fab,  Mat et Gilou, le dernier bassiste du groupe, arrivé récemment,  n’avaient pas décidé de prolonger l’aventure en trio sous le  nom de « Mo’ Fab et la chose électrique », devenu  rapidement « Mo’ Fab & the Electric thing ». Alors  il ne reste qu’à souhaiter bon vent à cette nouvelle formation et  à commander vite fait cet unique album des Bluesmiles. 
    Tant  qu’il en reste…	
    Y. Philippot-Degand