LIZARD
DVD Live Wendlingen Zeltfestival 8.10.2004

Musicians :
Georg Bayer - lead vocals
Volker Dörfler - guitar & vocals
Christof Berner - guitar
Klaus Brosowski - keyboards & vocals
Ralf Mende - bass & vocals
Helmut Kipp - drums
Wolfgang Rosner - drums
Additional musicians :
Bruce Brookshire - guitar & vocals
Stephan Kossman – vocals
Wolfman Volker Kunschner - organ
Matthias Holtmann – drums
Achim Bosch – bass

Titles:
1 - Riding On A Train
2 - Travelling Band
3 - Don't You Know
4 - Run Away
5 - The Boys Are On The Road
6 - One Of These Days
7 - Dreams
8 - Route 66
9 - Southern Man
10 - Doin' (It Again)
11 - Redneck Rock & Roll Band
12 - Gimme Some Lovin'
13 - My Fears Are Gone
14 - Josephine
15 - Running With The Horses
16 - Ordinary Southern Man
17 - Lonesome Guitar

Paradoxe du commerce: alors que Georg Bayer rend “définitif” son retour au sein de son mythique “Lizard”, paraissent dans les bacs le DVD et le CD de ses adieux tout aussi « définitifs » au groupe en octobre 2004. Les évènements vont vite dans le rock sudiste. Pour le tournage de ce DVD, on a installé les spectateurs conviés à la soirée d’adieu sous une grande tente, et que le spectacle commence !

Dès l’intro au piano du premier morceau, le très entraînant « Riding on a train », véritable cheval de bataille du groupe, bien boosté par la paire de guitaristes, on constate que la rythmique bénéficie de deux postes à la batterie. Derrière les fûts, Helmuth Kipp tiendra tout le concert, mais pour ce morceau, Georg Bayer tient à présenter le second batteur : Matthias Holtmann, qui cède aussitôt sa place au perpétuel « batteur de secours » du groupe : Wolfgang Rosner. Le ton est donné : le groupe donne tout ce qu’il peut pour Georg pendant que défilent les invités.

Bien sûr, en ce début de soirée, notre ami Georg est encore un peu contracté et sa gorge serrée fait ressurgir un de ses pêchés mignons : une petite tendance à forcer sur certaines notes, mais ça ne sera que passager : à partir du quatrième titre, la musique a complètement repris ses droits et notre frontman a adopté sa pause habituelle, le micro et son support solidement empoignés, et le regard perdu dans le lointain. En pleine concentration, Georg Bayer entend donner, comme d’habitude, le meilleur de lui-même, et le reste du groupe lui emboîte joyeusement le pas : pour « Don't You Know »,
la mèche est allumée par un chorus d’orgue, et sur « Run Away » les guitaristes commencent leur infernale sarabande
de double leads, qui se poursuit sur «  The Boys Are On The Road » avant une version de « One Of These Days »
gorgée de feeling.

A ce moment du DVD, avant de quitter la scène, Georg introduit son remplaçant : Stephan Kossman (ex-Flatman), qui se lance dans une longue version du classique « Dreams ». Ce sera son unique apparition, car Georg tient maintenant à laisser la scène à son « meilleur ami » : Bruce Brookshire, le leader de Doc Holiday, qui salue la foule en allemand (mais oui !) avant de retourner les compliments (« personne n’a autant fait pour moi dans le business musical que Georg Bayer… »), puis de s’emparer de la scène avec un « Road 66 » des familles, en totale communion avec un groupe qui rocke à tout va, visiblement heureux de ce retour aux sources. Malheureusement, cela coïncide avec le moment choisi par le(s) préposé(s)
à la table de mixage pour montrer son (leur) incompétence : malgré tous les efforts sur la scène de Bruce Brookshire pour indiquer quel sera le prochain soliste, les chorus des deux guitaristes de Lizard resteront presqu’inaudibles. Bruce Brookshire, dont la guitare est systématiquement mise en avant, et Klaus Brosowski ont échappé au massacre… Inadmissible à ce niveau !
Après avoir présenté les deux batteurs, Bruce Brookshire en profite de la célébrité du morceau pour faire chanter le public, qui s’y prête volontiers. Dommage vraiment que ce mixage honteusement approximatif ait gâché l’impact du titre.

Bruce Brookshire, très en forme ce soir-là, ne tarit plus d’éloges sur les musiciens de Lizard : « les meilleurs avec qui j’ai joué, au même niveau que mes gars au pays », en enchaîne avec brio sur ses classiques tirés de « Rides Again » : « Southern Man » et « Doin’ (it Again) ». «  Redneck Rock & Roll Band », issu lui de « Danger Zone », lui donne une nouvelle occasion de tresser des lauriers : « Georg en sait plus que moi sur la musique », avant de faire scander par le public le nom du héros de la soirée. L’a dû en être tout remué, le Georg, du fond des loges. Malheureusement, c’est aussi là que les cadreurs subissent la contamination de leurs collègues du son : la brillante succession des soli sera aussi sabotée par les images, le cadrage adéquat arrivant sur le « bon » musicien en général une fois le solo quasi terminé, malgré six caméras présentes!
Bruce Brookshire tient alors à nous présenter le prochain invité : Wolfman Volker Kunschner s’installe derrière son orgue pour « Gimme Some Loving », et là, on peut se demander si la bière n’a pas coulé à flots du côté de la table de mixage : l’orgue réussit à couvrir tout le monde, même le chant de Bruce Brookshire ! Et le pire est que ça dure ! Wolfman Volker Kunschner nous livre avec enthousiasme son numéro, allant jusqu’à faire le poirier sur son orgue, tout comme Steve Walsh le faisait jadis avec Kansas, quand Bruce Brookshire se prend soudain pour un animateur de fin de banquet. Mauvais plan : essayer de faire gueuler la salle, hommes contre femmes, en utilisant la plus basse démagogie (« Ladies rule the world… ») pour donner de l’ardeur aux braillards, nous éloigne de la musique, nous plonge dans la plus grande vulgarité et ne lui fait pas honneur. Pourquoi ne pas demander au public de tourner les serviettes, tant qu’on y est ?! Quel gâchis de voir des musiciens de cette classe se vautrer dans une telle complaisance ! Après cette déplorable faute de goût, il est grand temps que Georg revienne.

Ce retour débute par un grand coup de mou : « J’ai eu tellement de bonheur avec vous. » Et voilà notre grand gaillard tout émotionné, persuadé qu’il est alors de ne plus pouvoir revivre de tels instants ! Allons allons, faut pas se laisser aller, et le groupe se presse d’embrayer sur « My Fears Are Gone ». Ouf ! On est passé tout près du mélodrame. Et tour à tour Klaus Brosowski à l’orgue, puis Ralf Mende à la basse nous gratifient chacun d’une remarquable petite démonstration avant que les batteurs n’entament un impressionnant double solo. Les autres peuvent pendant ce temps-là prendre un pot en coulisse, histoire de se remettre de leurs émotions.
Tout ce petit monde revient pour un « Joséphine », tiré non du pur répertoire « Lizard » mais de la période « Borderline », ce qui explique que Bruce Brookshire soit de la partie. Achim Bosch tient la basse, et Ralph Mende, à la quatrième guitare (!) peut alors réaliser un rêve : un solo de guitare sur scène avec Lizard. Retour à une formation plus classique : la version de « Running With The Horses » n’aurait mérité que des éloges, avec un grand numéro des guitares et de Georg, si la table de mixage n’avait continué ses cafouillages. Enfin, Bruce Brookshire revient pour les deux derniers morceaux : un « Ordinary Southern Man » bien envoyé et un « Lonesome Guitar » de folie (quel magnifique morceau !), avec les trois guitaristes en solo simultané.

Pas de bonus (même pas « Bring me some Water » !), pas d’extra, le concert, rien que le concert, un très très bon concert d’ailleurs d’un point de vue musical, qui nous laisse pourtant un petit goût d’inachevé, car cet estimable DVD aurait pu réaliser le score parfait. Sans de grossières, mais très ponctuelles, approximations au mixage (car sinon, le son d’ensemble est plutôt bon), sans des cadreurs cadrant tous les musiciens sauf le soliste, là aussi ponctuellement, mais c’est quand même énervant, et sans le zèle intempestif de Bruce Brookshire pour mettre de l’ambiance, on tenait là un extraordinaire document sur le plus renommé des groupes sudistes allemands. Il y avait là les moyens qu’il fallait, un bon éclairage, un groupe de qualité avec leurs invités, un événement exceptionnel, tout était réuni pour obtenir un produit au top,
et du coup ces petits ratés deviennent rageants. Il reste quand même un très bon témoignage d’une soirée pendant laquelle d’excellents musiciens ont donné le meilleur d’eux-mêmes dans une ambiance festive pour accompagner le départ d’un des leurs. Ce DVD garde la précieuse qualité d’une atmosphère émotionnelle intense et bien rendue, et constitue un excellent point de départ pour tous ceux qui ne connaissent pas encore ni Lizard, ni Doc Holiday.

En même temps que ce DVD, un CD de la même soirée est disponible. Il porte le même nom mais ne comporte pas tout
à fait les mêmes titres : sont absents les titres 7 à 11 du DVD, et « Gimme Some Loving » est bizarrement placé en fin de sélection. Par contre, on a droit à un titre absent du DVD (pourquoi diable ?) : « Bring me some water », du CD de Lizard « Lonely are the brave ». Malheureusement, si ce CD bénéficie de l’entrain et de la compétence des musiciens, il souffre aussi des mêmes errements ponctuels au mixage, mais qui ne touchent ici qu’une proportion beaucoup plus réduite de titres. Là aussi, rater de si peu l’excellence a quelque chose de frustrant. Mais Georg est finalement revenu, et nous attendons maintenant le prochain CD studio.

Yves Philippot