MUDCAT Get your house in order (2007)

Musiciens: Mud – Guitar, Vocal. / Joe Burton – Trombone, b. Vocal. /
Dave Roth – Bass, Lead vocal on ‘When the lights go out’, b. Vocal. /
Eskil Wetterqvist – Drums, b. Vocal.

Featuring the Atlanta Horns arranged by Joe Burton:
Eddie Boyd - Saxophone.
Randy Skinner – Trumpet.
With:
Lola Gulley - Organ.
Jon Paskoff – Guitar.
Dan Francis – Rubboard, Percussion.
Evan Frayer – Accordion, Harmonica, Percussion, b. Vocal.

Titres:
01 Get Your House In Order
02 Whiskey Angel
03 Pressure
04 Don't Let Nobody Drag Your Spirit Down
05 Angels Sing
06 Agradesco A Dios
07 Gone
08 Cold Rainy Day
09 Odious Plot
10 When The Lights Go Out
11 Take Peace In Your Heart
12 Jiggarro
13 The Pistol Song
14 Trouble
15 Woman In Love
16 Agradezco Acustica

Ben là alors, ce n’est pas du banal. Il ne faudrait pas réduire ces musiciens à une bande de joyeux hurluberlus : avez-vous déjà entendu parler du « Piedmont Blues », dont Mudcat est l’un des plus prestigieux représentants et ardents défenseurs ? Cette originale branche du blues est formée d’un des plus grands « melting pots » qui soit. Danny Dudeck (« Mud » pour le grand public) et ses compères ont pour ambition de promouvoir dans la joie et la bonne humeur l’ouverture d’esprit et l’originalité, et de mélanger des styles aussi divers que Delta et Trash Blues, avec quelques bons moments de slide à la clé, Hillbilly, Old Time, Country, Fanfare, Funk, New Orleans Sound, Stomp, Gospel et même Tex Mex pour trois titres. Une sacrée sauce !
Pour vous donner une idée du côté au départ un peu givré de l’entreprise, l’instrument qui donne la réplique en solo à la guitare n’est pas un harmonica ou un clavier (d’autant qu’ Evan Frayer se la joue plutôt discrète) mais un trombone ! Et pas n’importe lequel : Little Joe Burton a joué avec BB King et Junior Wells, et même si ça vous paraît bizarre, on tient là une des grandes réussites de ce disque. En accompagnement avec les autres vents (les Atlanta Horns et Frayer), en contre-chant, et donc, pour finir, en chorus, le bonhomme fait bingo à chacune de ses interventions. Du grand art et une révélation pour ceux qui iront mettre le nez dans cet album.
Le dit album, le huitième du groupe si les comptes sont bons, a été enregistré à Atlanta dans les conditions du live en 3 jours seulement, en une seule prise par titre et sans overdubs, et offre 11 originaux de Mud lui-même pour 5 reprises inusitées, dont une d’Eric Bibb, « Cold Rainy day » de Curley Weaver,  « Jiggaro » de Cootie Stark et « Wish I knew trouble » de Ross Pead et Bill Sheffield. Une ambiance plutôt festive, à l’image de la musique de l’album, semble avoir régné dans le studio (« The Pistol Song »). Priorité a été donnée à la spontanéité et à la joie de vivre, ce qui donne une pêche indéniable à l’ensemble. Dans ces conditions on pardonnera les approximations émaillant la production, en particulier des vocaux à la justesse parfois incertaine, dans les chœurs comme dans le chant solo, et quelques interventions instrumentales aventureuses. En revanche, les parties de slide citées plus haut participent à la bonne tenue de l’ensemble et alternent avec des chorus entre Hillbilly et Country, avec le son bien sec qui va avec… Inutile donc d’aller chercher le « gros son » ici, le propos est plutôt de transformer au plus vite l’auditoire en zébulons agités du bocal, sauf pour l’inévitable slow à emballer les minettes, d’origine latino cette fois (hmmm, les ardentes Mexicaines aux yeux de braise, Luis Mariano, le costume blanc…), car « Agradesco A Dios », chanté en espagnol, se la joue ambiance franchement mexicaine, avec la section de vents où la trompette est ici un peu plus mise en valeur et le solo de trombone. On y a même droit aussi à un très joli solo de slide, un peu inattendu, mais ça le fait.
Il est vrai qu’à force de tout mélanger comme ça, on arrive à des mariages un peu étranges, réussis le plus souvent, comme l’harmonica blues sur fond afro-antillais (« Jiggaro »), mais un peu choquants de temps en temps, comme l’association entre country-blues et funk (« Take Peace In Your Heart »), où la fusion ne prend pas vraiment.
L’impression générale reste quand même celle d’une énergique invitation à faire la fiesta avec tout ce qui vous tombe sous la main, et le groupe s’emploie sans prétention ni chichi à simplement communiquer son enthousiasme et son amour de toutes sortes de musiques. Mission accomplie.

Yves Philippot