WEATHER REPORT Live at Montreux ( DVD -1976 )

Musicens: Joe Zawinul (keyboards) / Wayne Shorter (saxophones) / Jaco Pastorius (bass)
Alex Acuna (drums) / Manolo Badrena (percussion)

Titres:
01- Elegant People
02- Scarlet Woman
03- Barbary Coast
04- Portrait Of Tracy
05- Cannon Ball
06- Black Market
07- Drum And Percussion Duet
08- Piano And Saxophone Duet
09- Dr Honoris Causa And Directions
10- Badia
11- Gibraltar

1976, Weather Report connaît un summum: le groupe vient de sortir le remarquable “Black Market” et d’accueillir dans ses rangs Jaco Pastorius, qui pousse alors Chester Thompson, qui ne s’entend pas avec lui, dans les bras de Genesis. Pour appuyer le duo Joe Zawinul/Wayne Shorter, le groupe repose donc sur une rythmique inédite, mais terriblement présente et inventive, avec la paire Acuna et Bacirena. Ce line-up brillant prépare « Heavy Weather », autre moment très fort de la discographie du groupe, qui sortira l’année suivante, et s’arrête à Montreux pour livrer une prestation reconnue unanimement comme une référence, tant pour le groupe lui-même que pour l’impact qui en découlera sur le monde de la musique.
Ce DVD nous restitue onze titres de cette prestation légendaire. A côté des « succès » et futurs classiques issus de « Black Market » (le titre éponyme, « Elegant People », cinq titres au total sur les sept de l’album…), qui représentent l’essentiel des morceaux joués, on remarque l’entrée en force de Jaco Pastorius, au niveau des compositions, pour le groupe (« Barbary Coast ») ou en solo (« Portrait of Tracy », qui porte sa griffe complexe à base d’harmoniques). La prestation recèle aussi deux larges plages en duo pour les autres membres : les percussionnistes d’un côté et le couple Zawinul/Shorter de l’autre, et met en évidence l’impact de la polyrythmie signée Acuna/Badrena/Pastorius.
On peut s’estimer heureux de la qualité de ce témoignage quasi historique : pour l’époque, le son est bon en particulier grâce à un mixage sonore impeccable, les cadrages, souvent heureux, privilégient les portraits en action, mais aussi les aspects techniques, la lumière très claire permet de mettre en évidence une foule de détails et les musiciens au summum de leur forme s’investissent pleinement dans leur art.
Du côté du témoignage musical, on relève aussi une volonté manifeste du groupe d’innover, d’expérimenter, de faire appel à des influences étrangères. Certes, cette volonté forcenée peut déboucher sur quelques gimmicks, ou des gadgets (les imitations animales de Badrena, par ailleurs très en pointe sur toutes les recherches d’arrangement), mais on ne peut que saluer cette envie de renouveler la musique, grâce à une curiosité intarissable pour explorer tous les aspects du monde sonore. L’intérêt des musiciens pour les « musiques du monde » n’est donc pas récent.
Les jeunes générations découvriront aussi le travail incessant de Joe Zawinul, obligatoire à l’époque, pour sculpter sans arrêt en direct le son de son synthé, car il n’existait pas à l’époque de programmation des sons dans une banque. De même, Jaco Pastorius va directement manipuler les réglages de son ampli pour obtenir les effets désirés. Les musiciens de ce niveau devaient à l’époque être de véritables techniciens, et de ce côté-là, nous sommes servis : les membres de Weather Report sont de véritables pointures dans leur domaine.
Il reste quand même que ce domaine est le jazz-rock le plus évolué, et même si Weather Report tient à préserver le côté mélodique de sa production, cette musique complexe ne va pas parler à tout le monde. Mais pour les amateurs du genre, ce précieux DVD-témoignage est une véritable perle et un bonheur de tous les instants.

Yves Philippot