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Interview de Danny Liston octobre 2013
Philippe Archambeau et Y. Philippot-Degand
Traduction Y. Philippot-Degand
RTJ : Bonjour DANNY, Merci de bien vouloir répondre à nos questions pour The Road to Jacksonville,
webzine consacré au blues et au rock sudiste.
Danny : Très content de répondre à vos questions... Merci.
RTJ : Tout d’abord, peux-tu nous dire d’où tu viens ?
Danny : Je viens de St. Louis, Missouri. C'est dans le coeur des USA.
RTJ : Comment as-tu découvert la musique ?
Danny : J'ai été élevé dans une famille de musique. Ma maman jouait à la radio dans les années 30 et Pat et ma mamie était aussi musiciens, alors j'en étais entouré.
RTJ : Vous êtes deux frères, je crois que tu as 5 ans de moins que Pat, comment cela a-t-il joué sur votre façon d’apprendre la musique ? Y a-t-il une sorte d’émulation ?
Danny : Mon frère Pat avait un groupe quand il avait environ 14 ans. Je l'accompagnais pour monter son équipement et regarder son batteur. A l'origine, je jouais de la batterie, et j'ai brièvement joué avec Pat dans une revue soul, mais j'ai appris à jouer de la guitare en le regardant donner des leçons à mes amis. Il était impatient avec moi alors je m'entraînais quand il n'était pas à la maison. Pat n'a pas su que je jouais de la guitare avant que je n'aie un an de pratique derrière moi. Je ne dirais pas une émulation entre nous mais nous avions beaucoup d'influences en commun.
RTJ : Quelles ont été tes premières influences ?
Danny : Mes premières influences furent Little Richard, Ray Charles, Otis Redding, presque toutes venaient du R&B. Les seuls blancs que j'ai écoutés plus tard étaient Johnnie Winter et Gregg Allman.
RTJ : Jeune tu as eu plusieurs groupes, peux-tu nous en dire plus sur tes débuts ?
Danny : Mon premier groupe (Jokers Wild) était composé entièrement de mecs plus vieux de mon voisinage, ils organisaient des soirées, et rapidement ont decidé que j'étais trop jeune. Le suivant de mes groupes était les Soulful Illusions, ils étaient quand même aussi un poil plus vieux, mais c'était le groupe dans lequel Pat et moi jouions ensemble, il jouait de la guitare et je jouais de la batterie. Le suivant a été celui où j'ai rencontré Max Baker, c'était un groupe appelé Doc Savage. Max était le leader, et nous étions grands amis, et j'étais un petit marrant alors Max a pensé que je devais être dans le groupe. Je jouais de la guitare et je chantais. Ce qui a rendu les choses difficiles fut que je n'étais pas très bon à la guitare, et que je n'avais jamais chanté en public, donc mon office pour le groupe était limité, mais comme j'avais le leader comme meilleur ami, on va juste dire que les dés étaient pipés... Le projet suivant fut Mama's Pride.
RTJ : Est-ce vrai que Ronnie Van Zant désirait vous produire et vous voir assurer la première partie de
Lynyrd Skynyrd peu de temps avant l’accident d’avion du groupe ?
Danny : Yeah nous avons joué avec eux à Springfield Mo. Et avant le show Ronnie nous a raconté qu'Atlantic l'avait approché au sujet de la production de notre troisième disque, il a dit que nous en parlerions après le show. Une fois que nous eûmes fini avec notre set, de retour dans nos loges, il attendait à nouveau et il a dit " J'en suis, on va vous prendre pour la seconde partie du Street Survivor tour et rentrer ensuite et nous faire un disque"... Inutile de dire que nous étions scotchés par son enthousiasme... Cela ressemblait à la chance de notre vie...
RTJ : Comment avais-tu rencontré Ronnie Van Zant ?
Danny : Nous n'avions pas rencontré Ronnie avant ça mais à un moment notre société de management les avait eux, nous et les Outlaws. Quand ils en sont partis il y avait beaucoup de suspicions entre eux et la société de management. D'une façon ou d'une autre nous nous sommes trouvés pris au milieu, alors il y a eu une ambiance bizarre entre les deux groupes, mais lorsque nous avons joué avec eux tout s'était calmé, et tous les feux étaient au vert pour continuer.
RTJ : Peux-tu pour nos lecteurs, nous raconter comment Mama’s Pride s’est formé ?
D’où vient le nom du groupe ?
Danny : Mama's Pride s'est formé en 72. Mon frère Pat est revenu de Californie pour un séjour, Pat, Max et moi nous sommes assis en rond une nuit pour chanter, et nous avons décidé que nous devions en faire quelque chose. Une longue histoire, pour faire court, Pat est revenu vers Max et moi, nous avons recruté un batteur, et un bassiste, et nous sommes partis en Californie. Le nom était en l'honneur de notre maman à Pat et moi, qui a renoncé à sa carrière pour nous élever, alors c'était le moins que nous pouvions faire...
RTJ : Si tu devais définir la musique de Mama’s Pride, est-ce la soul, du blues, du southern rock ?
Ou un peu de tout cela ?
Danny : Je pense que la musique de Mama's Pride prend un petit peu de beaucoup d'influences. Nous avons tous joué dans des groupes de soul, blues, et certains de rock. Je pense que quand tu réunis tout ça, c'est en grande partie ce qu'est le rock sudiste.
RTJ : J’aime beaucoup Mama’s Pride pour ses ballades rock mid-tempo qui était votre marque de fabrique.
Je considère que Mama’s Pride est l’égal des grands groupes sudistes malgré que vous ayez beaucoup tourné, qu’est-ce qui a manqué pour que vous soyez plus reconnu ?
Danny : Je crois que l'ingredient capital qui a manqué a été les GRANDES tournées. Pensez que Skynyrd a tourné avec les WHO, les OUTLAWS ont tourné avec les Doobie Brothers, nous l'avons fait avec Charlie Daniels, Marshall Tucker, de super groupes, des gens fantastiques, mais nous jouions dans des auditoriums de 5 à 7 000 places assises, pendant que ces autres gars jouaient dans des endroits de 15 à 30 000 places assises. Il y a eu d'autres facteurs, mais ce serait totale spéculation. Avec la façon dont je m'autodétruisais avec la bibine je ne serais probablement pas là aujourd'hui si nous l'avions fait, alors tous comptes faits, peut-être était-il écrit que cela ne devait pas arriver...
RTJ : Penses-tu même si les concerts se font rares qu’on ait encore une chance de vous voir venir jouer en Europe ?
Danny : Je ne dis jamais jamais, mais cela poserait des problèmes. J'ai voulu jouer en Europe pendant longtemps mais cela nécessiterait une sérieuse organisation...
RTJ : Vous êtes de St Louis comme Pavlov's Dog, les connaissez-vous ? Avez-vous eu l’occasion de jouer avec eux ?
Danny : Nous connaissons très bien quelques mecs de Pavlov's Dog. David Surkamp, Steve Scorfina, nous avons enregistré au studio de Doug Rayburn. Il est décédé récemment, mais quel homme charmant il était. Mike Saffron joue en ville, en fait nous n'avons joué qu'une seule fois avec eux, question de styles de musique differents. J'ai juste joué un show avec Scorfina, et Soupe des Ozark Mountain Daredevils. Ce fut un super moment...
RTJ : Venons en à ton dernier disque God Used Mississipi, peux-tu nous dire comment tu l’as enregistré ?
Il a apparemment été fait dans deux endroits une partie à St Louis et l’autre à Memphis ?
Danny : Nous avons enregistré un tas de pistes à Memphis en 2011. Ensuite nous avons décidé d'ajouter quelques morceaux plus récents que j'ai écrits pour l'enregistrement mais on ne pouvait pas revenir sur Memphis, alors nous avons enregistré au studio d'un ami ici à St. Louis. Cela ressemblait un petit peu à essayer d'obtenir les pistes pour les rapprocher les unes des autres au niveau son, mais finalement je crois que Jim Gaines l'a réalisé. A propos, je lui ai envoyé une copie de ma chronique dans Bands of Dixie, et il a été surpris que quelqu'un en France ait déjà entendu parler de lui... Si jamais vous vouliez obtenir une interview, faites-le moi savoir, je peux vous filer un coup de main. (Grand merci, NdR.)
RTJ : Peux-tu nous en dire plus sur le rock chrétien ? Comment cela est-il perçu aux Usa ?
Danny : C'est dur de décrire l'industrie, car je suis trop en dehors du coup sur ce sujet. Mon âge, mon écriture, et mon style de musique ne sont absolument pas des choses même communes dans le courant de la musique chrétienne. J'ai fait une conférence sur le Gospel en 2009, et aucun des journalistes americains ne connaissait ou ne faisait attention à mon passé, avoir été signé par Ahmet Ertugün (qui fut le fondateur de la compagnie phonographique américaine Atlantic Records et le directeur du Rock'n roll Hall of Fame, NdT.), enregistré chez Criteria, et ainsi de suite, mais les journalistes européens le connaissaient entièrement, et ça a été un tel soulagement de pouvoir parler de musique, pas de matraquage publicitaire... Je me considère comme un musicien qui est complètement un Chrétien, mon CD No Other Name était une collection de chants que j'ai écrits pour mon église, parce que je ne pouvais pas trouver à chanter de chansons dont les paroles et la musique me passionneraient. La majeure partie de la CCM est de la pop musique, et elle ne m'émeut pas, et si je ne la sens pas, je ne pense pas que je peux de la même façon amener d'autres personnes à la sentir. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'existe pas ici-bas de grand artiste chrétien, mais il existe aussi beaucoup de bubble gum stupide et sans inspiration. J'aimerais juste être considéré comme un artiste, et laisser mes chansons parler d'elles-mêmes. God Used Mississippi est plus que ce dont j'ai l'habitude, les histoires. Oui ma foi sera toujours dans le moindre projet que je mènerai, parce que cela a sauvé ma vie et si je peux écrire une chanson qui peut impacter positivement sur la vie de quelqu'un, et bien c'est le but d'un songwriter...
RTJ : Sur cet album, il y a bien sûr ton frère Pat aux guitares mais aussi Jack Holder (Black Oak Arkansas entre autres), comment l’as-tu rencontré ? Vous connaissez-vous depuis longtemps ?
Danny : J'ai rencontré Jack à l'époque où nous réalisions No Other Name. Il était ami avec Kevin le technicien, et il n'a pas joué beaucoup, mais Kevin a dit que Jack tirerait profit du travail, alors j'ai pensé qu'il serait bon d'utiliser quelqu'un qui est aussi affamé que moi, et ce fut magique, et j'ai aussi gagné un bon ami. Maintenant Jack est tellement occupé qu'il est difficile de l'avoir pour une session, ce dont je suis content pour lui! C'est un super mec.
RTJ : Comment avez-vous partagé les parties de guitare ? Chacun d'entre vous avait-il un rôle défini exactement ?
Danny : J’aimerais avoir l'air assez organisé pour répartir les parties, mais honnêtement nous les avons choisies en fonction de leur disponibilité... (rires)
RTJ : On a aussi à la pedal-steel Don E. Curtis , décédé depuis, avais-tu souvent eu l’occasion d’enregistrer et jouer avec lui qui était aussi originaire de St Louis ?
Danny : Non je n'ai pas eu la chance de travailler avec Don auparavant, mais quel talent absolument extraordinaire il était. Une telle perte. Je me suis assis et l'ai écouté jouer pendant quelques heures pendant la session. J'étais captivé à ce point. Il faisait des séminaires à travers le monde entier, mais revenait à la maison et donnait des leçons à Scotty's Music. Un mec humble...
RTJ : Les titres sur cet album sont variés comment t’y prends tu pour composer ?
Danny : J'écris de différentes façons, mais la plupart du temps les idées me viennent en nombre pendant que je conduis. Je chante la melodie dans mon téléphone (une particularité que j'ADORE) et ensuite quand je reviens à la maison je commence à travailler les accords et la mélodie, et à chanter n'importe quoi pour voir si un titre ne surgit pas de nulle part. Normalement ça marche, mais ensuite il y a ces morceaux qui prennent une éternité.. Ce n'est pas mon fort mais ça arrive.
RTJ : J’aime beaucoup Ashamed of Yourself qui est un vrai titre de southern rock, feras-tu dans l’avenir un album qu’avec des titres sudistes ?
Danny : J'ai des doutes de pouvoir faire un album seulement de titres de rock sudiste, ou au moins dont je voudrais qu'il le soit. J'écris beaucoup de morceaux et je veux toujours utiliser les meilleurs. Malheureusement, pour un songwriter, son meilleur titre est le dernier qu'il a écrit !
RTJ : Peux tu nous en dire plus sur le premier titre « God Used Mississipi » qui est sur un tempo funk/bluesy,
et qui donne son nom à l’album ?
Danny : « God Used Mississippi » est une histoire vraie sur ma maman, mon frère Pat, et moi. Quand nous étions enfants ma maman, qui est née dans le Mississippi, avait l'habitude de nous y emmener, environ deux fois par an. J'ai toujours remarqué qu'elle riait beaucoup quand nous y allions et qu'elle semblait plus heureuse quand nous y étions. Ce que j'ignorais enfant, c'était que mon père était un alcoolique et que nous y allions pour fuir cette folie. Alors j'ai toujours eu une place très spéciale dans mon coeur pour le Mississippi.
RTJ : Un titre comme « I'll Keep Standing » concilie remarquablement le côté dansant et en même temps une qualité de composition et d'arrangement qui satisfera les puristes tout en essayant de véhiculer un message positif.
Il me fait un peu penser musicalement au « Sylvia » du regretté Taz Di Gregorio dans son album Shake Rag.
Peux-tu nous en dire plus sur l'élaboration de ce titre ?
Danny : « I'll Keep Standing » a été écrit dans le groove d'un vieux titre de Booker T. . Memphis du début à la fin. Ce que j'essaie de de faire dans mes chansons est d'apporter un message d'espoir. Je sais que quand je suis passé par mes problèmes d'addiction, je pensais que j'étais la seule personne sur Terre qui se sentait déprimée, souffrait d'anxiété, et j'ai envisagé de m'en prendre à ma vie en plus d'une occasion, alors je ne veux pas que quiconque se sente jamais perdu et seul, nous avons tous des problèmes et avec l'aide adéquate nous pouvons les résoudre. Je plaisante toujours lorsque je suis engagé pour parler en disant que j'étais 52 épisodes du Dr. Phil (talk-show américain présenté par Phil McGraw offrant des conseils sous forme de stratégies de vie, NdT.) emballés dans un seul mec... (rires)
RTJ : « I’m So Glad » nous donne des sensations prodiguées jadis par Bill Withers ou Marvin Gaye,
peux- tu nous en dire plus sur ce titre ?
Danny : Ce morceau est mon histoire. Il décrit un mec qui travaille dur pour réussir, et quand ça lui sourit, ça le tue presque. Il y a une ligne où je dis "J'étais retenu captif, par qui le devrais-je être, quand je regarde dans le miroir, je pense, qui c'est ça qui me regarde". Je me souviens de la nuit où c'est arrivé, mot à mot j'étais parti si loin à ce moment-là, je n'étais pas sûr que j'étais vraiment en train de me voir moi ou quelqu'un d'autre. Je sais que ça paraît bizarre, mais c'était ma réalité. Maintenant tu sais pourquoi je dis que je suis 52 épisodes du Dr.Phil, non? (rires) Musicalement je recherchais une sorte de son à la Little Feet, c'est intéressant que tu l'entendes dans la lignée de Marvin ou Bill Withers, c'est vraiment un compliment... La seule chose que j'aurais voulu faire de façon différente aurait été que James le batteur joue les huitièmes notes sur la caisse claire, mais je pense que ça fonctionne quand même bien.
Je voudrais vous remercier pour l'interview, et si l'occasion se présente un jour, j'aimerais réellement venir jouer
en Europe. Merci.
Merci.
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