DICKEY BETTS
Fom the Egg Albany, NY, 15/07/2005 Soundboard direct

Musicians :
Dickey Betts - lead guitar & vocals
Duane Betts - lead guitar
Michael Kach - keyboards & vocals
Pedro Arevalo - bass
Frankie Lombardi - drums
Kenny Crawley - drums
Twinkle - vocals


Voilà un album live comme nous les aimons, du "vrai" live, plein d'imperfections, mais tellement riche, et où on sent le formidable boulot des musiciens, sans retouche studio pour affadir et polir le son et gommer désagréablement tout défaut. Alors bien sûr, on a le droit
à quelques points regrettables : larsen sur deux morceaux, mixage quelquefois fantaisiste, en particulier au niveau des voix, mais aussi parfois de la guitare de Duane Betts ici et là couverte par les claviers et la rythmique, chœurs de temps en temps mal assurés, voir ponctuellement faux… Par contre, les plantades instrumentales, si elles existent (faut quand même tendre l'oreille, mais " Back where it all begins ", par exemple, malgré sa grande qualité par ailleurs, ne me semble pas exempt de tout reproche), sont rares, et témoignent de la qualité des musiciens du groupe.
Et c'est sur ce point que ce live marque positivement : le disque n'est pas un produit marketing quelconque, mais nous entraîne à une vraie soirée dans la salle, et le groupe
qui officie " assure ", avec des instrumentistes parfois brillants. Et alors quel bonheur ! Malgré toutes les craintes qu'un passé récent pouvait faire surgir, nous retrouvons ici un Dickey Betts en très bonne forme, sinon vocale (les drogues ne favorisent ni l'hygiène dentaire, ni la santé de la voix), en tout cas guitaristique. Pour le chant, rassurez-vous quand même, on pouvait s'attendre à bien pire, et finalement ça ne se passe plutôt pas
trop mal, malgré une diction moins nette qu'autrefois, mais surtout sa guitare a gardé intacts son babil enthousiasmant et sa sonorité d'antan. Un très bon point pour tous les amoureux de l'œuvre de ce grand musicien.
Great Southern nous propose une composition modifiée après le départ de Dan Toler : Duane Betts vient épauler son père et se défend plutôt bien. Certes, sur " Getaway ",
on sent qu'il ne se " lâche " pas encore, et son solo est plus appliqué qu'instinctif, mais il nous offre en revanche un duel de très haut niveau avec son père sur " Southbound " et il assure sans faiblir toutes les parties en harmonie. Le groupe hérite aussi d'un deuxième batteur, Kenny Crawley, mais son entente avec Frankie Lombardi a encore besoin de se rôder pour pouvoir prétendre approcher le niveau de l'ABB. On va leur laisser quelques années… Par contre, Pedro Aravalo brille sur de nombreux morceaux, contribuant grandement à un " In Memory of Elizabeth Reed " splendide en tous points, et je ne parle pas là de son remarquable solo de basse, mais de sa prestation tout au long du morceau ! Se mêlant de temps en temps avec habileté aux lignes harmoniques, tout en continuant à servir de liaison avec la pulsation des batteurs, ce gars-là pose candidature pour devenir une future référence de la basse sudiste, pourtant pas dépourvue de talents.
Un autre des piliers sur lesquels semble s'appuyer Dickey Betts s'appelle Michael Kach, marteleur de touches de son état. Il se tire honnêtement de la responsabilité du chant solo sur plusieurs morceaux (" Statesboro Blues ", qu'il a la sagesse de (bien) prendre au piano pour éviter toute comparaison pesante avec l'icône Greg Allman, " My Getaway ",
" Come on in my Kitchen ", plutôt réussi, " Nobody left to run with ", qui emmène le groupe visiter avec énergie les ambiances à la Bo Diddley, de façon plus rugueuse que le
" No One to run with " studio de 1994, c'est le même titre rebaptisé…), et son piano illumine plusieurs morceaux, dans un style dynamique qui correspond magnifiquement à la musique jouée. De temps en temps, l'orgue vient prendre le relais, de manière tout aussi convaincante. Une bonne surprise pour ceux qui découvriraient le bonhomme.
Enfin, Dickey a recruté une chanteuse, Twinckle Schachle, essentiellement pour les chœurs, mais qui a aussi droit à un " Stormy Monday " en solo, bien assuré mais sans qu'on la sente s'imposer vraiment, et qui participe de façon importante au chant sur " Southbound " et
" Change my Way of Living ". Sa contribution est quelquefois difficile à apprécier en raison du mixage (elle est trop souvent " oubliée " à la table), mais il semblerait que son rôle soit plus un renfort vocal qu'une tentative pour la propulser progressivement sur le devant
de la scène.
Sinon, dans un répertoire laissant une large place aux morceaux composés par Dickey pour l'album 1994 de l'ABB (" Where it all begins "), on pourra découvrir une autre version live de " Having A Good Time ", titre assez récent, une curieuse intro (mais pourquoi pas ?) pour un " Blue Sky " à la fois réussi globalement, performance notable car le morceau n'est pas facile à bien " rendre ", tout en étant un poil moins guilleret, moins tranchant que la version studio et souffrant un peu des choeurs à trois voix imparfaits, un " Rambling Man " assez gaillard malgré le mixage, et un très bon " Jessica " en rappel.
Au fil du concert, on sent les musiciens se détendre et prendre de plus en plus de plaisir,
et cela se ressent dans leur jeu. La réussite incontestable de leur version de " In Memory… " a dû leur faire du bien. Ce groupe a encore besoin de tourner pour prendre de l'assurance, mais ce concert offre de belles perspectives et donne dès à présent beaucoup de plaisir,
par sa musique certes, par l'assurance de la classe intacte de Dickey Betts, mais aussi par l'authenticité qui s'en dégage, et qui devient hélas trop rare de nos jours.
Cet enregistrement un peu " brut " est précieux par la saveur inégalable qu'il dégage.
C'est du " vrai " ! Allez, laissez-vous tenter, vous ne le regretterez pas.